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INTERVIEW


BURKINA FASO | Cheriff Sy : « Ce n’est pas un bulletin de vote qui a amené le président Blaise Compaoré au pouvoir. »

FASO | Cheriff Sy : « Ce n’est pas un bulletin de vote qui a amené le président Blaise Compaoré au pouvoir. »
Publié le août 8, 2014 par Charles K. Somé

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« Chériff Sy s’est senti une vocation de journaliste, depuis sa tendre enfance. Un métier qu’il a très tôt embrassé dans les années 80, avant de devenir patron de presse en 1990 avec «Bendré», un hebdomadaire d’informations générales et d’analyses. Avec sa casquette de président de la Société des éditeurs privés (SEP), le journaliste se prononce dans cette interview qu’il a bien voulu nous accorder, sur les récents cambriolages dont des journaux ont été la cible. Il a aussi endossé son costume de citoyen et d’observateur de la vie politique nationale, pour donner son point de vue, on ne peut plus clair, sur les préoccupations de l’heure. Pour lui, «Ce n’est pas un bulletin dans les urnes qui a mis Blaise Compaoré au pouvoir, a-t-il martelé. Tout en ajoutant «qu’en tant que garant de la constitution, Blaise doit la respecter». Entretien avec un journaliste qui dit ce qu’il pense, et pense ce qu’il dit.

En tant que président du TAEF, quelles sont vos activités ?


Cheriff Sy, Directeur de publication du journal Bendré et Président de la Société des éditeurs de presse privée

The Africans editors forum, (TAEF) le Forum des éditeurs africains, est une organisation continentale. Elle est subdivisée en 5 régions, à l’image des 5 régions de l’Afrique. Ce sont surtout les structures régionales qui mènent des activités visibles dans le cadre de la défense et de la liberté des médias, du développement des médias et de la formation des acteurs. TAEF en tant qu’organisation continentale se prononce sur un certain nombre de sujets relatifs aux médias et à la gouvernance politique du continent. La dernière activité a été l’audit des services de communication de l’Union africaine que nous avons initié. C’est notre contribution en tant qu’organisation des éditeurs africains, en tant qu’Africains. Nous avons estimé qu’il y a une défaillance dans la communication de l’UA. Il se peut, et nous le croyons, que l’UA fait de bonnes choses, mais personne ne le sait. Nous avons donc fait des propositions concrètes et c’est à l’UA de les mettre en œuvre, selon ses besoins. Nous avons présenté l’audit à la présidente de la commission et aux commissaires. Ils ont très bien apprécié cela. Le reste, nous allons suivre. Je dois dire que nous avons financé cet audit sur nos fonds propres. Nous n’avons pas demandé un copeck à l’Union africaine. En ce moment, nous préparons le conseil des éditeurs qui va se tenir en Afrique du Sud, du 5 au 7 septembre 2014.

Hier, c’était le président de la SEP, l’Opinion, aujourd’hui, c’est l’Evénement et peut-être un autre, demain. Comment avez-vous accueilli les nouvelles de ces multiples cambriolages ?

Quand on me dit qu’on a cambriolé un journaliste ou un journal, ma première inquiétude, c’est de savoir si lui-même est sain et sauf. Si cela est acquis, je dis Dieu merci. Le reste, c’est du matériel. En ce qui concerne ces cambriolages de façon générale, il faut dire d’abord, que la première des sécurités ne peut venir que de nous-mêmes. Nous exercerons un métier qui nous amène parfois à avoir une somme d’informations ou des documents que d’aucuns peuvent estimer qu’ils sont sensibles, dérangeants. Il faut que nous sachions nous protéger, protéger nos outils de travail et de production. A priori, nous ne disposons pas d’éléments comme nous l’avons dit dans la déclaration de la SEP, parue la semaine dernière (), nous ne disposons pas d’éléments pour dire l’intentionnalité ou l’identité des faits. Ce sont des cambriolages qui interpellent. Moi-même, j’ai été spolié à domicile de deux ordinateurs, de mon disque dur et de mon appareil photo. On n’a rien pris d’autres que cela. Une semaine après, mon ami, Mathieu Bonkoungou (NDLR : correspondant de la BBC au Burkina) a été aussi spolié de son ordinateur et de son appareil photo. Ensuite, nous avons eu le cambriolage de l’Opinion et celui de l’Evénement. Peut-être que d’autres journalistes ont subi des choses qu’ils n’ont pas déclarées. En temps normal, cela pourrait ne pas faire plus de bruit. Mais, nous sommes dans une situation politique «trouble et complexe». Cela peut amener à penser ceci ou cela. La position de la SEP est qu’il faut être suffisamment regardant sur ces types de cambriolage et diligenter rapidement, des enquêtes pour retrouver les cambrioleurs. L’expérience nous a enseigné qu’il ne faut pas banaliser ces genres de situation. C’est en les banalisant qu’on est surpris un matin, qu’aux encablures des rues, des confrères soient agressés ou tués. Nous allons rester en veille à la SEP pour suivre l’évolution des enquêtes sur ces cas.

Quelle est votre lecture de ces cambriolages qui ne visent pas a priori ? des numéraires comme d’ordinaire ?

Dans le cas spécifique de ces organes, on pourrait penser que c’est un cambriolage normal. Mais comme je vous l’ai dit, des documents ont été minutieusement, fouillés à l’Evénement, cela peut amener aussi à penser que c’est un cambriolage ciblé de gens qui cherchent quelque chose de précis. Au moment où je vous parle, la SEP n’a pas d’éléments pour dire que c’est ciblé ou non. Nous restons néanmoins, vigilant par rapport à l’enquête qui se mène sur ces aspects.
La SEP a quand même évoqué des intimidations dans la déclaration qu’elle a publiée.
Nous sommes dans un contexte politique qui est déjà assez délétère. Laissons même le contexte politique. Votre outil de travail ? c’est votre ordinateur, votre disque dur, votre caméra, votre enregistreur. Si on vous pique ce matériel, pendant que vous êtes en train de couvrir un meeting par exemple, ça peut passer. Quand on vous pique à domicile précisément ces outils-là, ou bien au siège de votre organe, ça peut laisser penser aussi, que cela participe d’un processus d’intimidation pour vous amener à lever un peu votre plume ou votre micro, parce que vous touchez des sujets peut-être qui dérangent d’aucuns. Quand on vous fait cela, ça participe d’un processus qui peut amener, si la personne n’est pas suffisamment aguerrie, à l’autocensure ou à reculer par rapport à votre travail. C’est d’ailleurs pour cela que nous insistons sur le fait que nous ne banalisons pas. S’il s’avère que c’est un processus d’intimidation, ça veut dire que si l’intimidation n’a pas réussi, il faut qu’on passe à d’autres étapes.
Le rédacteur en chef du journal l’Evénement, Newton Ahmed Barry a accusé d’emblée, les services de l’Etat. Nous nous en tenons à la déclaration de la SEP.

Cette question est-elle suffisamment prise au sérieux par les services concernés de l’Etat, à votre avis ?

Nous espérons que les enquêtes aboutiront. Dans mon propre cas, il y a eu des constats. Si jusque-là, il n’y a pas de résultats, je n’ai aucun élément qui me permet de dire qu’il a une mauvaise volonté pour mener l’enquête, que c’est délibérément fait. Je rappelle que la première responsabilité, je l’ai située à mon niveau. J’estime que je n’ai pas pris suffisamment de précautions, ce qui a permis ce vol, qu’il soit ciblé ou pas.

Pour en venir aux sujets qui divisent les Burkinabè, le référendum et l’article 37, comment analysez-vous les propos du président Blaise Compaoré, qui affirme ne s’être pas encore décidé ?


« Il y a une constitution qui est là avec ses insuffisances certes, mais elle est là comme loi fondamentale. »

Pour faire la part des choses, nous parlions des cambriolages en ma qualité de responsable de média et de la SEP. En ce qui concerne la gouvernance politique, c’est en ma qualité de citoyen burkinabè, Sy Chérif, que je m’exprime. Mes propos n’engagent que moi. Si cela est bien compris, je suis à l’aise pour répondre à ces questions. Qu’il n’y ait pas d’amalgame. Cela, je ne sais pas par rapport à quoi le président doit se décider ? Est-ce son propre texte démocratique ? Selon la constitution en vigueur au Burkina Faso en tout cas, son mandat se termine en novembre 2015. Il doit se décider par rapport à quoi ? Qu’il se pose lui-même cette question m’étonne fort. Il n’y a pas à se décider. S’il estime lui, garant de la constitution, qu’il doit se décider, je ne sais sur quoi il entend se décider. Il appartiendra aussi aux Burkinabè de se décider. Je ne répondrai pas sur le référendum, parce que des voix plus indiquées que moi ont suffisamment exprimé l’illégalité d’un tel référendum. Il faut qu’on soit sérieux. Il y a une constitution qui est là avec ses insuffisances certes, mais elle est là comme loi fondamentale. Cette constitution est suffisamment précise quant à la durée du mandat présidentiel, quant au contexte d’organisation d’un référendum. Je suis donc étonné que l’intéressé ou d’autres personnes se posent la question. Ce qui est par contre, peu claire, c’est qu’est-ce que les Burkinabè veulent ? La constitution prévoit aussi que lorsqu’on vous fait la force, il faut vous défendre. Si les gens s’asseyent sur leurs honorables postérieurs et en font des débats de maquis, c’est leur problème. A partir du moment où c’est un acte illégal, il faut que les gens réagissent par rapport à cette illégalité. Je ne vais pas rentrer dans de grandes théorisations, mais il faut que les Burkinabè apprennent à être, un tant soit peu, courageux. Que nous apprenions à nous départir des non-dits, à nous assumer par rapport au regard de nos enfants, par rapport aux générations futures. La vérité, s’il y a une vérité, est toute simple. Le président Blaise Compaoré qui dirige le Burkina depuis 27 ans, n’est pas arrivé par les urnes au pouvoir. Il est arrivé par les armes au pouvoir. Quel que soit ce qui a été monté, fabriqué, légalisé par la suite, cette vérité, on ne saurait l’effacer. Pourquoi voulez-vous que quelqu’un qui est arrivé au pouvoir dans un contexte particulier, change ce contexte particulier, à un moment donné ? Je n’en dis pas plus, comprennent ceux qui voudront comprendre. Ce n’est pas un bulletin dans les urnes qui a mis Blaise Compaoré au pouvoir, ce sont des armes. La logique qui s’ensuit, vous devrez la comprendre.

Que faire pour qu’il y ait une présidentielle apaisée en 2015 ?

La démocratie est par nature apaisée. Une élection présidentielle est toujours apaisée. Pourquoi voulez-vous que ce soit autre chose. Si elle n’est pas apaisée, ça veut dire qu’on a réuni les conditions pour qu’elle ne soit pas apaisée. S’il y a un texte qui organise les élections, une structure qui organise, un code électoral, toutes les conditions d’une élection apaisée sont réunies. Mais, est- ce que les conditions sont réunies pour que l’accueil de la déclaration du référendum soit apaisé ? C’est deux choses différentes.

Pensez-vous que l’opposition actuelle incarne l’alternance ?

Entendons-nous d’abord sur l’alternance. S’agit-il de mettre X à la place de Y ? Un changement de régime ou l’affirmation de choix politiques nouveaux qui prennent en compte les aspirations fondamentales de notre peuple ? Pour ce qui me concerne, je répète que le peuple burkinabè recèle en lui, des capacités intrinsèques de produire des fils dignes à même de prendre en charge sa destinée pour lui assurer un devenir meilleur que celui qu’il connaît. Je ne limite pas cela dans le cadre d’un parti.

Sur des sujets cruciaux, le chef de l’Etat a l’habitude de se prononcer sur des médias internationaux. Quelle est votre appréciation, en tant que journaliste ?

Sur nombre de questions effectivement, les réponses ou les vues du président sont parvenues à sa population, à ses concitoyens, à travers des canaux extra locaux. Cela pose des problèmes, parce que si les médias nationaux n’ont pas accès au premier responsable du pays, ça veut dire qu’au plus haut sommet, on considère ces médias pour peu. La logique aurait voulu que ce soit à travers les médias locaux que les médias internationaux puissent avoir les vues du premier responsable de l’Etat. Ça veut dire qu’au sommet de l’Etat, on considère ces médias pour peu. Ça veut dire aussi qu’il y a un discours qui n’est pas forcément adressé aux Burkinabè, mais à l’extérieur. En tous les cas, cela est suffisamment méprisant et insultant pour nos médias, mais aussi pour le peuple burkinabè, aussi. Il n’est pas normal que pour des questions d’importance qui regardent les Burkinabè, les journalistes locaux ne puissent pas échanger avec le chef de leur Etat. C’est paradoxal, parce que beaucoup de médias locaux ont fait cette démarche, c’est-à-dire ont souhaité une interview avec le premier responsable du pays, et c’est resté lettre morte. Au-delà de la démarche de nos médias, je ne vois pas pourquoi spontanément, le président, s’il a envie d’aborder certaines questions, ne fait pas la démarche vers les médias, que ce soit pour une conférence de presse, ou un échange entre eux. Je pense que cela va plus loin que les médias, c’est la considération que l’on a pour son peuple. C’est à ce niveau qu’il faut lire. Je laisse les uns et les autres à lire.

Votre opinion sur la gouvernance du président Blaise Compaoré ?


« Je ne chanterais pas comme certains qu’ils ont construit ceci ou cela comme si c’était extraordinaire. C’est dans la normalité des choses. Chacun est venu pour déposer une brique sur celle de l’autre. »

Il faudra peut-être plusieurs éditions de votre journal pour parler de cette question. J’estime que ce n’est pas un bulletin de vote qui a amené le président Blaise Compaoré au pouvoir. Il est arrivé au pouvoir, un certain 15 octobre, dans la violence et dans le sang. Ils ont dirigé, lui et ses anciens et nouveaux partisans, ont dirigé ce pays par des méthodes suffisamment fortes, suffisamment peu démocratiques. Le pays s’en ressent profondément, sur le plan national et international. Ils sont arrivés certainement, comme le climat politique le fait sentir, à l’épuisement de leur contenu. Il est temps qu’ils cèdent la place. Je ne chanterais pas comme certains qu’ils ont construit ceci ou cela comme si c’était extraordinaire. C’est dans la normalité des choses. Chacun est venu pour déposer une brique sur celle de l’autre. C’est ainsi qu’on construit une maison. Le contenu de ce régime est totalement épuisé. Leur bonne raison voudrait qu’ils comprennent qu’il est temps de partir. La chose qui est certaine, c’est qu’ils partiront soit dans la violence, soit dans la paix. Mais le carburant est complètement fini.

Votre avis sur Roch Marc Christian Kaboré ?

C’est le leader d’un nouveau parti, qui est issu du régime en place. Il est aussi comptable des 27 ans de régime de Blaise Compaoré qui affirme aujourd’hui, qu’il s’est trompé, même s’il ne spécifie pas sur quoi il s’est trompé. Toujours est-il qu’il se prononce ouvertement contre le référendum, le sénat, pour une alternance démocratique. C’est au pied du mur qu’on voit le vrai maçon.

Et sur le président de l’UPC, Zéphirin Diabré ?

Il a créé son parti qui s’affirme d’obédience libérale. Il est allé aux élections, il a engrangé un certain nombre de députés. Il faut avouer qu’il a été à un moment donné, à la pointe de la lutte pour un certain nombre de revendications politiques. Ce que je tiens à souligner particulièrement sur l’UPC et sur d’autres partis pour ne pas réduire à des hommes, que ce soit Zéphirin Diabré, Arba Diallo, Me Bénéwendé Sankara, la conjugaison de leurs efforts a permis d’avancer, sinon une grande ouverture d’espaces démocratiques au Burkina. Les gens peuvent s’exprimer sur beaucoup de questions, parce que ce combat a été mené. Si le MPP est né, c’est parce que toutes ces organisations ont mené un combat qui a donné du courage à des gens de quitter le CDP pour créer leur parti. Je ne suis pas convaincu qu’il y a dix ans, ces gens auraient quitté le CDP et à d’autres de s‘exprimer librement, sans qu’aux encablures d’une rue, un gourdin ne tape leur tête.

Le sommet UA/Afrique s’est achevé hier mercredi 6 août 2014. Pensez-vous qu’il apportera quelque chose de notable aux Africains ?

Autant que les sommets France/Afrique m’ulcéraient, autant les sommets Etats-Unis/Afrique m’ulcèrent pour l’Afrique. Comme des mendiants larmoyants, nous accourons tous à la convocation d’un autre Etat. L’Afrique a des problèmes à se poser. Si une cinquantaine de chefs d’Etat veulent affirmer leur souveraineté, je pense que ce genre de fora sied mal pour nous, en tant qu’Africains. Je vois, à travers les réseaux sociaux, la presse, des gens se réjouir même du fait que Kerry ait toqué Blaise Compaoré, Kabila par rapport à la révision constitutionnelle. C’est bien, c’est de la plus-value, ce ne sont pas les Etats-Unis qui viendront résoudre nos problèmes ici. Les Burkinabè ne doivent pas attendre que d’autres apprécient à leur place. Questionnons-nous, sortons de ce schéma d’avilissement. On a nos problèmes, trouvons les solutions nous-mêmes. »

Source: Journal Aujourd’hui au Faso Interview réalisée par
Karim TAGNAN & Dramane KONE


21/10/2014
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OUATTARA HEMA DJAFFAR, PRECHEUR A DE BOBO-DIOULASSO: « Dans notre constitution, aucune présidence à vie n’est prévu »

Lui c’est Héma Djaffar Ouattara, d’autres l’appellent affectueusement,  Djaffarma. Il a subi sa formation de maitre coranique au Mali et a fini  en 1971. De retour au pays, il s’est installé à Bobo-Dioulasso, la capitale économique du Burkina Faso. En 1992, Djaffarma créa le Comité Culturel de la Génération des Trois Testaments (CCGT).  Pour ses propos tranchants et durs, il a fait la prison et a été expulsé du pays. A son retour d’exil, il continua ses activités de prédication et de maitre coranique. Aujourd’hui il a une école coranique  de plus de 600 élèves, avec un auditoire non négligeable. Nous lui avons tendu la perche, pour en savoir plus sur sa vie et aussi sa lecture de la vie socio politique du pays.

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Le Quotidien (Q) : Parlez-nous de vous, M. Héma ?

Daffarma (D) : Je suis né  en 1944 à Gouindougouba dans la province de la Comoé. L’école coranique, je l’ai commencée à Bondokuy. Ensuite je suis allé au Mali à Djéné et à Tombouctou précisément. Puis au Sénégal et dans bien d’autres pays.  J’ai commencé le prêche et ensuite, j’ai créé le Comité Culturelle de la Génération des trois Testaments (CCGT). Nous avons donné ce nom à notre association, mais nous ne détenons pas la paternité véritable. C’est en conformité avec ce que le prophète Mohamed (saw) a dit et  avec l’appui des versets du Coran. En effet Dieu dit : « O vous les gens du livre, vous ne vous appuyez sur rien à par l’Evangile, la Tora et tout ce qui a été révélé par votre Seigneur, le Coran ». Pour un vrai musulman, le seigneur a cité trois livres. C’est la raison pour laquelle on ne peut parler d’une vraie religion hors de ces trois livres.

(Q) : On sait qu’au Burkina et même hors des frontières du pays, vous êtes connu. Comment avez-vous gagné toute cette notoriété ?

D : Lors de nos prêches, nous ne  disons que la vérité et le Seigneur ne soutient que ce qui est vrai. Cette vérité, quoi qu’il en soit va parcourir toute la terre. Nous, du CCGT, prêchons avec les trois livres. Avec  les chrétiens et les juifs, nous avons de très bonnes relations. Mais lorsque ces derniers déroutent du chemin d’ALLAH, nous ne tardons pas de leur dire la vérité. La religion chrétienne, juive et celle musulmane sont frères et sœurs. C’est pourquoi nous ne manquons pas de réagir lorsqu’il y a un manquement. Nous sommes aimés de par le monde à cause de notre bonne lecture des livres révélés.

 

(Q) : A vous entendre parler, on voit que vous maitrisez le trio de livres révélés. Pouvez-vous nous en dire un peu ?

D : Vous savez Dieu fait des dons à ses créatures. J’ai d’abord appris le Coran. Ensuite je suis allé vers les autres livres. Aussi les connaissances des jurisprudences et autres, c’est une grâce de la part du Créateur.

 

(Q) : Quelle est votre lecture de la charia ?

Quand on dit charia ce n’est  pas pour les musulmans seulement, même dans la Bible, elle est mentionnée. C’est un peu la justice théocratique. Le fait de voler et qu’on te coupe la main, le fait de tuer et être  tué en retour, ainsi que la lapidation due à l’adultère tout ceci est inscrit dans la Bible. Il faut reconnaitre que cette pratique de la charia n’a pas commencé avec MAHOMET. C’est depuis le commencement. Vous entendez parler de charia c’est des lois  qu’il faut apprendre pour pouvoir l’appliquer. Il ne faut pas aller trouver quelqu’un, l’attraper et lui couper la main. Il faut d’abord savoir ce qui a été volé, ou, quand, comment et pourquoi? Il  ne faut pas aller  jeter une bombe dans un marché et croire que c’est cela le djihad. Mais non le djihad n’a jamais été appliqué de cette manière. Pour faire le djihad il faut aller prêcher voir la sourate  « MAIDA » dans le Coran,   la Bible et la Tora. Dire la vérité cachée aux hommes, les sensibiliser sur la portée de la religion. Leur parler de la jurisprudence. Sans oublier de leur indiquer les impacts des manquements aux lois divines. C’est tout un processus qu’il faut impérativement faire avant d’appliquer la charia.

 

(Q) : Chez les musulmans il n’y a  qu’un seul livre le Coran, mais au sein  de la religion il y a beaucoup de divergences idéologiques, pourquoi cela ?

H : Ces divergences, c’est du aux Hadiths (les paroles du prophète) sinon ce n’est ni le Coran ni la Bible. C’est pourquoi Dieu, nous l’a dit dans la sourate « la Table Servie : « O vous les gens du livre, vous ne vous appuierez sur rien tant que vous n’avez pas la Tora, la Bible et le Coran ». Dieu nous a cité ces trois livres.  En dehors de ces trois documents le reste n’est que du banditisme.

 

(Q) : Quelle relations existe t-il entre les religions révélées et celles dites traditionnelles ?

D : Je pense que c’est du relativisme, car Jésus, autant que Mahomet sont venus après ces religions. Chacun à son chemin, adorez ce que vous voulez, c‘est un choix. Vous n’adorez pas ce que j’adore et à moi aussi de faire pareil. Chacun à son chemin confessionnel. C’est une révélation de Dieu,  au prophète de l’islam. Je vais vous dire ceci.  Avant l’arrivée de ces religions révélées en Afrique, les gens avaient déjà l’idée de Dieu. Quand tu volais la femme d’autrui, ou quand tu commettais un acte de vol, il y avait une loi. L’erreur est , qu’ils veulent comparer leur document au Coran. Excepté ce coté,  ceux qui croient en ces religions ont leurs raisons.

 

(Q) : Êtes-vous membre de la fédération musulmane ?

D : Je suis fondateur d’une association.  Pour moi aucune association n’est plus vieille que la Bible. Et l’idée de l’association est révélée dans les autres livres saints. Donc mon association se veut être internationale et universelle. Celui qui veut peut me suivre et celui qui ne veut pas continue son chemin. Mais quant à moi je continuerai avec mes trois livres. 

 

(Q) : Quelle analyse faites-vous sur l’organisation du hadj au Burkina ?

D : Organiser le hadj pour faire quoi ? Non, l’idée ne m’est pas encore venue. Les gens partent en Amérique, en France,  est-ce que ces voyages sont organisés ?  Donc ne pensez- vous pas que derrière tout cela se cache une escroquerie qui ne dit pas son nom ?  Sinon, c’est possible que chacun parte de lui-même avec seulement la supervision de juste quelques personnes de la part des autorités. On doit aider les gens à aller à la maison de Dieu et non les escroquer. Ceux-là qui font  ces genres d’activités sont plus que des démons.

 

(Q) : Aujourd’hui, dans la société africaine,  on remarque que l’Education souffre à tous les niveaux, selon vous qu’est ce qui a occasionné cela ?

D : Je lie la baisse du niveau de l’Education au fait qu’il n’y a pas de respect entre  parents et enfants et aussi entre maitres et élèves. J’en déduis que si on ne s’en tient qu’à ces deux points seulement, le Burkina par exemple est « foutu ». Il faut voir comment est ce que les enseignants souffrent dans les écoles. Ils n’ont pas le droit de corriger un élève à cause des règlements. Si l’enseignant s’entête à le faire, il ira répondre à la justice. Imaginez comment sera une société ou c’est les droits de l’enfant qui priment sur ceux des parents. Quel genre d’avenir préparons-nous pour ces enfants ? Je me demande ? Un enseignant qui est menacé parce qu’il a corrigé un enfant, pensez-vous qu’il va se mettre au sérieux pour encadrer ce dernier ?  J’en doute fort. Dans cette optique, je pense qu’il n’y a plus d’Education. Et c’est le gouvernement qui encourage cela avec ses lois. Pourtant leurs enfants sont dans d’autres pays ? Sont-ils éduquer de cette façon dans ces pays, mais je vous dis que non. Vous savez, il faut reconnaitre que de nos jours, que si l’Education va mal,  c’est parce que le Burkina n’aime pas des enfants. Dans la Bible Dieu dit « celui qui n’éduque pas ces enfants, Je vais l’éduquer en enfer ».

 

(Q) : Vous avez combien de talibés dans votre école ?

D : J’ai environ 600 élèves.

 

(Q) : Que vous pensez-vous des talibés ?

D : Relativement à cette question qui a fait et qui continue de faire couler des encres et des salives, je me suis maintes fois posé cette question. Est-ce réellement ceux qui prennent  une boite de tomate qui sont talibés? Vous savez, nombreux sont ceux-là qui ont pris la boite juste pour le nom ou pour en faire un métier. Etre talibé veut dire  « celui qui cherche la connaissance ». Sinon le talibé, c’est  l’équivalent de l’étudiant dans la culture occidentale. Tous ceux qui sont dans la rue ne sont pas forcement des talibés. Quand vous êtes venus chez moi, vous avez vu des enfants en train de faire la lecture coranique ?  Par contre à cette heure, il y a d’autres enfants qui se promènent en ville à la recherche de quoi manger. Les gens dramatisent le concept de talibé juste pour gâter le nom de la religion musulmane. Ils disent que c’est eux qui sont les petits bandits, braqueurs et autres, mais en réalité, c’est difficile pour qu’un talibé dans le vrai sens du terme, puisse détenir une arme blanche, à cause de la formation qu’il reçoit, car c’est une formation qui prône la paix, la tolérance et combat l’injustice à tous les niveaux. Il y a des enfants qui sont dans la rue parce que leurs familles n’ont pas pu les scolariser, ces derniers ne sont pas des talibés. Les enfants qui sont avec moi, par exemple mendient. Cette pratique n’a pas commencé par eux. Lorsque le prophète Moise quittait l’Egypte, Dieu lui a dit  « comme tu n’as rien Moise, dis à tes femmes d’aller mendier auprès des femmes du Pharaon. Elles te donneront à manger ». Quand tu n’as rien, il est mieux que tu ailles quémander que de prendre un couteau et dépouiller quelqu’un. Etre talibé, ce n’est pas un travail, c’est juste une nécessité temporaire.

 

(Q) : Vous qui n’envoyez pas les enfants dans la rue pour des raisons financières, alors que l’on sent que vous êtes nanti, cela est du à quoi ?

D : (Rire) belle question, sachez que hormis le fait d’être prêcheur et maitre coranique, je fais aussi de la pharmacopée traditionnelle. Depuis mon retour du Mali en 1971, Je cultive. J’ai plus de trois grands champs aujourd’hui d’environ 60ha.

 

(Q) : Lors de vos prêches vous ne vous dérangez pas  pour critiquer un problème, qu’il soit social ou politique pourquoi cela ?

D : Je vous ai dit au début que si aujourd’hui moi je prêche ce n’est pas grâce aux hommes, mais plutôt grâce à  Dieu. Je parle pour que les gens changent de comportements, pour que la société change, mais positivement. Les gens pensent que j’insulte, alors que ce n’est pas le cas. J’ai juste une façon à moi, d’apporter ma pierre à l’édification de ma société. Je le fait pour tout le monde. Le président Blaise Compaoré est aussi mon président comme tous les Burkinabè. Il  est le premier responsable de ce pays. Si c’est  de lui que vous voulez parler, donc je pense que s’il y a des choses qui ne vont pas bien au Burkina, il est le premier concerné aussi. C’est la raison pour laquelle je prends la peine de le lui dire. N’ayez pas d’arrière pensée car autan que vous, le président est aussi mon frère. J’ai l’impression que les gens me comprennent autrement.  Pourquoi voulez-vous que j’appelle l’âne par un autre nom alors que c’est son nom? Vous comprenez  que cela est une chose difficile à faire.

 

(Q) : On rencontre vos cassettes aujourd’hui de par le monde, est ce que cela voudrait dire que vous bénéficiez d’un droit d’auteur, M. Héma ?

D : Non et je n’ai pas besoin de vendre mes cassettes pour vivre. Moi ma récompense c’est Dieu qui me le rendra.

 

(Q) : Quelle est votre lecture sur la vie sociopolitique actuelle au Burkina?

D : Ici au Burkina chacun fait ce qu’il veut et pense comme il le veut. Je pense que les choses se passent pour le moment bien vu que nous sommes sous un régime dit démocratique. De Maurice jusqu’à Sankara les élections se faisaient avec des armes, mais aujourd’hui  c’est dans les urnes que l’on choisit son dirigeant.  Aussi, je souligne qu’en  démocratie chacun est libre de dire ce qu’il veut et sans pour autant outrepasser ses limites.

 

(Q) : Quels conseils pouvez-vous donner à nos autorités ?

D : La clé de la paix est entre les mains de Blaise Compaoré, s’il accepte son départ en 2015, cela consolidera la paix et la démocratie.  Je pense que le tour serait gagné.  Mais si le contraire venait à arriver, alors le pays risque de sombrer dans un chaos total. Dans un pays, il y a des lois pour le bon fonctionnement de la Nation. Il est  dans l’obligation de tout le monde de les respecter. Dans notre Constitution, aucune présidence à vie n’est prévue.  Dans la démocratie, il faut que le pouvoir passe d’une main à une autre. Sinon,  quand le pays sera fracturé, je pense que la danse risque de prendre fin.  Il faut que Blaise Compaoré reconnaisse, qu’il n’a pas travaillé plus que les autres présidents passés et qu’il est temps pour lui de rendre le flambeau. Je dis que tous ceux-là qui sont autour de lui, son des larrons. En réalité ils ne l’aiment pas. Ils sont là pour leurs intérêts.

 

(Q) : Pour sortir avec plus d’honneur qu’est-ce que vous proposez à Blaise Compaoré ?

D : La solution est avec lui. Aujourd’hui nul ne peut lui apprendre comment il faut diriger une Nation. Dites moi, y a-t-il un président qui soit parti dignement sans qu’il n’y ait les armes ? Je n’en vois pas, à part le cas ghanéen. A mon humble avis, un ancien président a plus d’honneur et de pouvoir qu’un nouveau, s’il accepte de respecter les lois fondamentales de la Nation. Car il devient le pilote de la nation dans sa maison de repos. Blaise Compaoré a travaillé et tout le monde le reconnait. Cependant je pense qu’il n’est pas le seul fils de ce pays. La seule façon pour que les gens reconnaissent la grandeur de sa personne, c’est de ne pas chercher à briguer un autre mandat après 2015.

 

(Q) : Votre lecture de la crise israélo-palestinienne ?

D : C’est une longue histoire Cette histoire ne finira jamais parce qu’il y a deux vérités. La première vérité est que, la Maison sacrée se trouvant à Jérusalem, est pour les Israéliens. Cela est même mentionné dans la Bible et le Coran et non pour les arabes. Si les musulmans acceptent cette vérité et laissent la Maison aux Israéliens, on ne parlera plus de crises.  Et la seconde vérité est que les Israéliens acceptent que les arabes soient leurs frères et la terre promise soit aussi la leur.

Propos recueilli par Ibrahima ZALLE

 


09/10/2014
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Crise malienne: « La crise finira si les parties impliquées ont leur part du gâteau »

En 2012, au moment où Amadou Toumani Touré, le président malien à l’époque, préparait la fin de son mandat, un coup d’Etat surgissait au palais de Koulouba. A la même période, des salafistes et indépendantistes armés dans le Nord du pays réclamaient la cession entre la partie septentrionale et occidentale du Mali. Cette crise a fait de nombreuses victimes tant sur le plan militaire que civil, occasionnant du coup un afflux considérable de familles dans les pays frontaliers du Mali dont le Burkina Faso. A Sag-Nioniogo, localité  située dans la commune rurale de Pabré, au nord de Ouagadougou, nous avons pu rencontrer Ali Ag El Hadi, un refugié malien, qui témoigne sur sa situation et sur bien d’autres sujets.

 

Le quotidien : Parlez-nous de votre séjour au « pays des Hommes intègres » ?

Ali Ag El Hadi : Nous avons été bien accueillis et tout se déroule  bien, sans trop d’inquiétude.

 

Depuis votre arrivée et votre redéploiement sur le site, bénéficiez-vous de prises en charge ?

 Depuis notre arrivée, tout se passe bien. Je souligne que c’est le Haut -commissariat des Nations Unies aux réfugiés  (HCR) qui assure la protection, IEDA qui s’occupe de la gestion du site. Il y  a aussi OXFAM, la Croix rouge, l’ONG Terre des hommes et bien d’autres. En ce qui concerne l’enseignement, au niveau primaire, il y a une continuité et il est pris en charge par l’ONG Terre des hommes. Pour le secondaire, cette année, on n’a pas eu de partenaire. On avait 118 élèves au secondaire répartis entre Ouagadougou et Sag-nioniogo Et il n’y a que 18 qui ont pu être scolarisés et les 100 autres vont rester. Le HCR explique cela par le manque de moyens

 

Comment appréciez-vous ces moyens?

Pour les prises en charge, on  a de nombreuses ONG qui interviennent sur le site ; donc on ne  s’en plaint pas trop.

 

A votre arrivée jusqu'à ce jour, avez-vous une idée du nombre de réfugiés maliens présents sur le sol burkinabè ?

A notre arrivée, il y avait près de 75 000 réfugiés et entre-temps, on tendait vers les 100 000. A ce jour, le nombre a considérablement diminué car les gens sont partis pour  de multiples raisons. Par exemple, l’assistance n’est pas de taille à tous les niveaux.  De ce fait, les gens préfèrent partir et d’autres même disent qu’ils préfèrent aller mourir  plutôt  que de rester sur le site.

 

La paix est relativement revenue dans le Nord.  Pensez-vous  repartir  ou y a-t-il toujours la peur ? Y a-t-il des rapatriements volontaires ?

Nous pensons repartir, mais la politique et le problème racial restent un véritable obstacle. Ceux qui avaient la peau noire étaient hier marginalisés, mais présentement les choses ont changé et c’est ceux-là qui ont la peau blanche qui sont  indexés comme étant des djihadistes. Et tous ceux d’entre eux qui retournent au pays font quelques jours à la gendarmerie avant de reprendre leur train de vie. C’est des choses qui sont humiliantes et  cela pousse les gens à ne plus vouloir partir. Il y a toujours de la crainte. On nous dit que les djihadistes ne sont plus sur le terrain comme au début, mais on refuse de nous dire qui sont  exactement ces gens qui détiennent les armes et sèment toujours la terreur. On ne donne pas une position précise de ces hommes armés et pourquoi Kidal est resté tel, pourquoi la Minusma ne contrôle- t-elle pas réellement cette zone ? Pourquoi arrivent-ils à faire des petits attentats ? D’où sont-ils ? Par où passent-ils pour rentrer ? Ils ne sont pas hors du pays à mon humble avis. Vous savez, ce n’est pas dans l’habitude du Touareg de voir partout des hommes en tenue militaire. Psychologiquement, tout le monde est frustré et surtout les enfants. Il y a eu tellement de pertes tant humaines que matérielles et beaucoup sont ceux-là qui se demandent qui va réparer cette injustice. C’est ce qui pousse de nombreuses personnes à ne pas encore parler de retour. Les moins nantis quant à eux préfèrent rester sur les sites pour bénéficier des prises en charge parce que là-bas ils ont tout perdu, tout a été pillé. Mais en dépit de ces aspects, il  y a des rapatriements volontaires, des gens qui acceptent de repartir d’eux- mêmes. Il y a eu un moment où le HCR avait essayé  d’initier des départs volontaires, mais il a dû  suspendre à cause des attentats qui ont eu lieu à la même période. Malgré tout, certains préfèrent partir à cause de l’assistance qui n’est pas de taille.

 

Quelle analyse  faites-vous de la crise malienne ? Espérez-vous un dénouement rapide vu que la médiation a presque changé de main ?

Le problème est de tous les côtés et c’est un problème d’intérêt. La crise finira si  les parties impliquées ont leur part du gâteau. Ce n’est pas en changeant de médiateurs que la crise  prendra fin. Il faut que les Maliens eux -mêmes s’asseyent au tour d’une table pour laver leur linge sale. Il n’y a pas un mal sur cette terre qui ne puisse pas avoir de remède.

 

Vous êtes en contact avec les populations restées au Nord-Mali. Dites-nous quelles informations avez-vous sur la situation sécuritaire actuelle ?

On a des parents qui sont restés dans certaines zones où il n’y a pas de problème. Même au moment de la pleine crise, il y a des zones qui n’ont pas été touchées. Pour les zones touchées, présentement, on peut dire qu’il y a de l’amélioration. D’autres par contre sont restés et préfèrent mourir que de quitter leur localité à cause de leurs investissements. Le plus souvent, c’est avec eux que nous avons les informations.

 

Comment expliquez-vous la récurrence de la violence et des combats au Nord-Mali malgré la présence des forces françaises et onusiennes ?

On sent effectivement la présence de tout ce beau monde pour la sécurité, mais on se pose la question de savoir si ces gens sont là pour la sécurité ou pour leurs propres intérêts.  Pourquoi sont-ils là exactement ? Et je souligne aussi que ce sont des questions difficiles à résoudre. Ces forces de sécurité sont présentes pour leur business. Elles nous disent être là pour nous, mais sont contre nous. Quand nous parlons d’intérêt, vous savez bien comme moi que le Nord-Mali est une zone qui regorge de ressources, principalement minières, surtout le pétrole et l’or. De même, c’est un canal pour le trafic de drogue. Tout cela il fallait faire quitter X qui dérangeait  pour amener Y et voir comment la gestion pouvait se faire en leur faveur bien sûr. Il ne faut pas occulter que ATT qui était cité comme un exemple de  démocrate est autrement vu aujourd’hui. Par ailleurs, pourquoi ne pas dire que ce sont ces gendarmes de la paix qui sont les instigateurs de ce désordre. Car à un mois ou deux avant, un  coup d’Etat est survenu pour des raisons non réellement élucidées jusqu’à ce jour. Il est accusé d’avoir laissé les Touaregs rentrer avec des armes et il fallait le faire partir. Mais en réalité, c’est à cause du fait qu’il avait donné la licence d’exploitation du pétrole aux Chinois et que l’ancienne métropole n’étant pas d’accord avec cette décision, l’a poussé à sortir par la petite porte de l’histoire. Le trafic de drogue dans le Nord-Mali par exemple, c’est la chasse gardée des Américains.  Ce flanc est politique et c’est cet aspect qui est pris en compte lors des résolutions des crises, alors que le véritable problème qui est social, en réalité,  est rangé dans les oubliettes. Pour dire simplement que même si la crise prenait fin maintenant dans ces conditions, dans quelques années, elle resurgira.  En clair, la sortie de crise n’est pas pour maintenant. 

 

Quelles solutions de paix pouvez-vous décliner en tant que ressortissant de cette région ?

Pour moi, la recherche de la paix va de pair avec l’implication de tous les acteurs, et quand je parle  de tous les acteurs c’est y compris l’armée, les couches politiques et la population.  La plupart du temps, on règle les problèmes militaires, politiques et on pense avoir résolu la crise dans un pays. Le plus souvent,  je demande aux  Touareg de s’inclure dans la politique, car si c’était le cas on ne parlerait pas de crise aujourd’hui. S’ils avaient des éléments dans les institutions de prise  de décision, ils allaient pouvoir donner des idées, se faire valoir et se faire entendre. Quand on prend le Nord par exemple, c’est l’une des zones qui  fait rentrer des devises  non négligeable au Mali alors qu’il est délaissé. C’est une zone où il y a moins de structures étatiques, raison pour laquelle ses problèmes sont en second plan dans la politique de Bamako. Il y a aussi le cas racial qu’il faut revoir et  dont personne ne veut parler. Mais le véritable problème est que la crise ne date même pas de maintenant.

 

Les djihadistes étaient-ils de bons musulmans?

Aujourd’hui, je me demande ce que c’est qu’être bon musulman. Si c’est couper la main de son prochain qui est la religion, alors je me dis qu’elle est sévère. Dieu dit que c’est Lui seul qui rend justice et voir l’attitude de ces hommes, on dirait qu’ils sont des demi-dieux. Je trouve en réalité que les djihadistes n’étaient que des trafiquants de drogue, des hommes d’affaires peut-être engagés par d’autres personnes, par d’autres pays qui sèment la zizanie en Afrique. Comme le fait d’importer les maladies et du n’importe quoi qu’ils envoient en Afrique. C’est une façon d’amener  le continent à ne pas se développer.  

 

Participez-vous à la vie politique du Mali, depuis le Burkina ?images.jpg

Nous nous impliquons d’une façon ou d’une autre. J’ai même participé aux élections et j’étais dans un bureau de vote avec la collaboration de l’ambassade du Mali, au Burkina.

 

Vous êtes au Burkina depuis presque trois ans ; comment trouvez-vous la vie communautaire au Burkina ? Etes-vous facilement acceptés ?

Au début, on sentait la peur, vu le stéréotype que les gens avaient de nous. Mais il faut reconnaitre qu’avec le temps, les choses ont changé et nous nous intégrons facilement. Seulement, nous sommes dans les camps qui sont un peu éloignés de la ville, et je pense que cela peut être un obstacle pour l’apprentissage de la culture burkinabè. Par exemple, il y a des Burkinabè qui se marient avec des filles touaregs. Ici nous retrouvons des valeurs qui n’existent pas chez nous. Des valeurs qui peuvent nous permettre de résoudre des petits problèmes. Au Burkina, on sent que n’importe qui peut insulter son prochain à cause de la parenté à plaisanterie et c’est des valeurs qui sont comme un ciment social. On voit aussi des propos tel que «  au nom de ton papa, au nom d’un tel je te laisse ». C’est des valeurs de ce genre que l’on devrait apprendre dans l’optique de pouvoir changer des mentalités au retour. Si on avait des échanges inter culturels, cela allait nous aider. A cet effet, J’ai demandé aux partenaires de nous dire pourquoi l’éducation n’est pas en premier lieu dans leur programme. Alors qu’ils savent que le manque d’éducation est un véritable problème. Je sens que l’on nous amène à ne même pas être ouverts. Moi je suis dans le monde communautaire, avec une association. Je verrai comment inculquer cette culture que ce soit par des sketchs, des causeries, etc.

 

En 2015, le président du Burkina et aussi médiateur dans la crise malienne,  Blaise Compaoré, sera en fin de mandat et ne sera plus en mesure de se présenter. De ce fait, la question de la révision de la Constitution, en son article 37, se pose pour lui permettre de briguer un autre mandat après presque 28 ans de règne. Quelle lecture faites-vous de cette situation ?

En démocratie, je pense que rester longtemps à la tête d’un pays, c’est créer davantage de problèmes pour le pays et de façon récurrente,  c’est ce qui occasionne les crises dans les pays. Vouloir briguer un autre mandat serait une façon de dire que « si ce n’est pas moi il  n’y a pas une autre personne. Je suis de telle ou de telle ethnie et c’est nous qui dominons le pays ». Si vous prenez le cas  du Mali, un Touareg n’a jamais été président, raison pour laquelle le développement est mono polaire. Cela amène donc des révoltes, des frustrations. Sur le site d’hébergement, c’est des sujets qui reviennent le plus souvent dans nos causeries. Et on se dit que si  la crise malienne ne trouve pas un dénouement finale d’ici là, c’est- à -dire en 2015, nous serons dans l’obligation de rentrer, pas par nous- mêmes, mais plutôt par cas de force majeure. Car nous entendons la population en parler. Je pense que s’il aime son pays et sa population, la meilleure façon serait de les écouter. Généralement, la population écoute les dirigeants. Mais cela n’est pas réciproque. Pour le cas des politiciens, ils n’approchent le peuple que quand leurs intérêts sont menacés.

 

Le spectre d’une crise plane- t-il sur le pays des Hommes intègres?

De  par la lecture des gens on sent qu’il y a une crise à l’horizon. Avec les multiples marches, les élèves, les étudiants, quand on regarde tous ces mouvements, on ne pourrait pas de dire que les choses peuvent changer, dans les jours à venir.images (1).jpg

 

Au moment où les négociations  se mènent à Alger, il y a des attentats dans le Nord notamment vers Kidal. Qu’en pensez-vous ?

C’est comme je l’ai dit en sus, à l’heure actuelle, on ne dit pas qui sont ceux-là qui sont à Kidal, parce que beaucoup de ces djihadistes disent qu’ils sont du camp du MNLA et se sont retranchés à Kidal. Donc ils ont toujours les moyens militaires. La seule alternative à ce problème est qu’il faut passer au désarmement de ces gens. Car c’est de Kidal qu’ils arrivent à ressortir et faire ces attentats. Je pense que c’est plus que des foutaises, au moment où une partie du peuple se trouve en Algérie, pour une sortie de crise. Il y a des gens qui se permettent de rester au pays et de procéder à des attentats. En fait, on ne sent même pas du sérieux dans cette affaire.

 

Il y a quelques jours, les présidents africains étaient  aux Etats-Unis. Pensez-vous que cela est prometteur  pour l’avenir de l’Afrique ?

Je pense que si les choses continuent ainsi,  les présidents africains vont comprendre qu’ils ne sont pas les hommes de la situation et qu’il est temps pour eux de plier bagages. Durer au pouvoir ne peut pas résoudre le problème d’un pays. Et je me dis que Obama a fait savoir que les pays africains n’ont pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes. De plus, je pense que cette rencontre est beaucoup plus amicale que politique. Il faut aussi voir qu’elle peut porter un coup à la Françafrique si elle continuait.

 

Votre dernier mot?

Nous souhaitons la paix en général, la paix au Mali pour permettre aux gens de repartir, parce que nous sentons un retard de trois ans. En plus, nous demandons aux politiciens, à tous les acteurs de la médiation, de mettre leurs penchants de côté et de se focaliser sur la paix durable afin de permettre aux Maliens refugiés de pouvoir retourner dans leur pays.  On sent une crise sérieuse surtout alimentaire dans les années à venir si cela continuait.

 

 

Propos recueillis par Ibrahima ZALLE 


08/10/2014
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CPI/L’Ex-aide de camp de Blé Goudé fait des revélations : “Blé Goudé récolte ce qu’il a semé”

CPI / Blé Goudé – La haine entre les frères de Guibéroua – Avant l’audience de confirmation des charges : L’Ex-aide de camp de Blé Goudé sort de son silence

 

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l s’appelle caporal Goudé Koudou Honoré. Il était un élément de la Garde républicaine de la caserne de Treichville et était l’homme de main de Charles Blé Goudé. A 72H de l’audience de confirmation des charges contre son ancien patron, le caporal Goudé a décidé de s’ouvrir à L’Expression pour crever l’abcès.

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08/10/2014
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